Le bonheur de faire des courses
Publié le vendredi 1er octobre 2010 à 08h51min
Le sport ne se résume pas à la performance. Il est aussi un état d’esprit et une source de convivialité. Partout en France, comme dimanche entre Sedan et Charleville, la course à pied représente un formidable vecteur de cette volonté.
Les Ardennes, vous connaissez ? Non... ? Eh bien vous manquez quelque chose. Si si, je vous assure. Surtout si vous êtes coureurs à pied. Dimanche aura lieu Sedan-Charleville, une course pas tout à fait comme les autres. Cette grande classique fêtera en effet sa 90 ème édition. Un record pour une course de ville à ville. C’est en 1906 qu’une quarantaine de coureurs s’élancèrent pour la première fois de Sedan pour rejoindre Charleville, distante de 24 kilomètres. Depuis, excepté lors des deux guerres, la course a toujours eu lieu le long de la petite route qui suit le cours de la Meuse, nourrissant son histoire d’épisodes parfois épiques. Lors des premières éditions, les commissaires lâchaient même des pigeons au passage des premiers coureurs pour informer leurs collègues de la ligne d’arrivée de l’ordre de passage des concurrents. Les plus grands sont ensuite venus participer à cette épreuve. Alain Mimoun, champion olympique du marathon 1956, inscrivit son nom au palmarès en 1959 et en 1960. Michel Jazy, un peu plus tard, prendra également le départ.
Au-delà des athlètes de haut niveau, la course attire surtout des anonymes dont le seul souci est de franchir la ligne d’arrivée au stade du Petit-Bois. « Chaque Ardennais, quel que soit son âge, met un point d’honneur à courir Sedan-Charleville, témoignait il y a quelques années dans L’Equipe Yanny Hureaux, historien régional. Cette course est une institution et relève du domaine de la légende. Un monsieur d’une bonne soixantaine d’années m’a dit un jour : le jour où je ne prendrai plus le départ, c’est que j’aurais déjà un pied dans la tombe... À une époque, faute de moyens, on avait parlé de sa suppression. Toutes les Ardennes avaient alors grondé ». Le Sedan-Charleville est une part importante du patrimoine culturel ardennais. Comme pour une étape du Tour, deux heures avant le passage de la course, les habitants se pressent sur le parcours, sortent tables, chaises pliantes et banderoles et encouragent chacun des coureurs. Cet accueil des Ardennais, au paroxysme dans la dernière petite montée avant l’arrivée avec un véritable corridor humain qui ne s’ouvre que pour laisser passer les coureurs, a conquis tous ceux pour qui la course à pied est avant tout l’occasion d’une grande fête. Dimanche, ils seront encore 3000 au départ.
Champagne, grands crus, foies gras, huîtres...
Trois milles coureurs venus transpirer (24 bornes quand même...) mais surtout vivre une ambiance propre à ces épreuves sur route qui possèdent une âme. Il y a une quinzaine d’années, le mensuel Jogging International a créé le label « Jours de fête » regroupant des courses où la performance pure est reléguée au second plan, des courses où l’on se souvient davantage d’un éclat de rire, d’une ambiance ou d’un déguisement que de son chrono. Il y a bien sûr mi-septembre le fameux Marathon du Médoc où les kilomètres sont rythmés par les dégustations de Pauillac, Saint-Estèphe, Saint-Julien, tous les grands crus bordelais des propriétés empruntées par le parcours. Et pour éviter la fringale et mieux franchir le « mur » bien connu des marathoniens, les organisateurs ont également pensé aux ravitaillements « solides » avec jambon, entrecôte, fromage, glaces et même 15000 huîtres offertes au 39 ème kilomètre. On est loin ici des gels énergétiques ! Quant aux cardio-fréquencemètres et autres technologies en tous genres imposées par le marketing outrancier des fabricants, inutile de s’embarrasser avec.
En mai, les amateurs de convivialité se retrouvent aussi sur les 22 km de La Champenoise, à Damery, près d’Epernay, au cœur du vignoble champenois avec ravitaillements au champagne dans chacun des villages traversés (à consommer avec modération... surtout en course). Plus de 26 nations étaient représentées lors de la dernière édition et plus des deux tiers du peloton déguisés. Le 10 octobre, la Ronde des Foies Gras (25 km) accueillera à Mauvezin (Gers) d’autres épicuriens de la course à pied venus découvrir un parcours qui les entraîne parfois dans les cours des fermes, au milieu des canards et des oies grises. On pourrait également citer Marvejols-Mende et sa dégustation d’aligot ou son tour de la ville en petite tenue (voire même sans tenue du tout pour certains...). Et bien d’autres encore. Parce qu’un peu partout en France, nombreux sont les sportifs pour qui les notions de chrono et de record sont bien le dernier des soucis. Des coureurs qui conçoivent avant tout leur pratique comme un moment de bien être et de plaisir.
Odyssea, courir utile
Au-delà de la convivialité, la course à pied permet aussi de sensibiliser à certains grands problèmes de société. Paris accueillera ainsi dimanche 3 octobre, la course Odyssea contre le cancer du sein. Près de 17000 coureurs ou marcheurs, hommes et femmes, sont ainsi attendus dimanche à Paris sur les 10 km du parcours tracé au cœur du bois de Vincennes. En 2009, 185000 € avaient été récoltés pour l’institut Gustave Roussy, premier centre de lutte contre le cancer en Europe. Le circuit Odyssea se dispute tout au long de l’année dans 9 villes (Nantes, Chambéry, Dijon, Tours, Saint-Jean-de-Luz, Brest, Cannes, Paris et Île de la Réunion).
Renseignements : Odyssea
* Article publié par Pascal Gregoire-Boutreau
Voir en ligne : L’équipe