Les Kényanes à la poursuite du record du Monde du marathon
Publié le mardi 22 octobre 2013 à 18h49min
Titillés par la réussite de leurs homologues masculins, les athlètes kényanes réfléchissent à un plan pour battre le record du monde du marathon féminin, établi par la Britannique Paula Radcliffe il y a plus de dix ans.
"Pourquoi ne pourrions-nous pas faire comme nos hommes ?", s’interroge ainsi Florence Kiplagat, double vainqueur du marathon de Berlin. Le 29 septembre, Wilson Kipsang a établi à Berlin un nouveau record du monde chez les hommes en 2 h 03 min 23 sec. Il battait ainsi la marque établie deux ans auparavant par son compatriote Patrick Makau, également à Berlin, en 2 h 03 min 38 sec. Pas de chance pour Florence Kiplagat, vainqueur chez les dames de ce même marathon en 2011 et 2013, justement, et dont les succès sont alors restés dans l’ombre. "Même si j’ai eu le grand honneur de remporter la course femmes en deux occasions, ce sont les hommes qui ont chaque fois été les héros du jour", a regretté Florence Kiplagat auprès de l’AFP.
"Je me suis vraiment réjouie pour Makau et Kipsang, en sachant très bien que la prochaine fois ce serait à mon tour d’être une héroïne si je battais le record du monde", souligne l’athlète de 26 ans, ancienne championne du monde de semi-marathon, dont le record personnel sur le marathon est de 2 h 19 min 44 sec, à Berlin 2011. Le temps de référence de Paula Radcliffe, établi en 2003 dans les rues de Londres en 2 h 15 min 25 sec, est devenu l’une des marques de référence de l’athlétisme mondial. Mais depuis, peu de femmes ont été capables de descendre sous les 2 h 20 min. Radcliffe avait eu recours à un athlète masculin kényan pour réaliser son record, mais cela n’est plus possible désormais puisque les règlements ont changé, interdisant les lièvres masculins pour que la tentative de record soit éligible. Son record apparaît d’autant plus intouchable.
Le temps est venu pour nous les Kényanes de faire un essai. Il est compliqué pour une personne de le faire seule, mais si on fait un travail d’équipe, on peut y arriver. Quatre d’entre nous ont couru en dessous de 2 h 20 min, et si nous planifions bien les choses, et courrons en équipe, c’est possible", a estimé Florence Kiplagat. Priscah Jeptoo, vice-championne olympique et vainqueur du dernier marathon de Londres, pense que les Kényanes ont besoin de sélectionner une course au relief plat et rapide (comme Berlin, Chicago ou Londres) puis de s’entraîner spécifiquement et courir en équipe. "Je pense que c’est faisable si nous mettons en place une approche commune en vue d’une course spécifique, comme le marathon de Berlin ou Londres", souligne Jeptoo, 29 ans. Elle aimerait une course où elle-même (2h20’14"), Mary Keitany (2h18’37"), Florence Kiplagat (2h19’44") et Edna Kiplagat (2h19’50") "s’entraident et poussent les unes et les autres à aller en-dessous de la marque mondiale".
"Il devra y avoir une responsabilité collective où toutes nous choisissons une course, et à la fin, nous permettons à l’une d’entre nous de faire le record", ajoute Jeptoo, soulignant le besoin d’avoir recours à des lièvres rapides. Edna Kiplagat, elle, avoue son scepticisme quant à la faisabilité d’un tel projet. "Il sera très difficile pour nous toutes, athlètes de haut niveau, de débuter une course avec l’objectif en tête de battre un record", argumente l’athlète de 34 ans. Les revenus des athlètes kényans, hommes et femmes, dépendant largement des victoires, des bonus et des points engrangés dans les principaux marathons, cela rend délicat le projet de travailler en commun et l’idée de se sacrifier. Cela étant, elle estime le record de Radcliffe battable. "Cela nécessite qu’une personne, son coach et sa famille s’unissent derrière elle, afin qu’elle puisse bien se préparer", avance Edna Kiplagat, qui envisage un dernier essai contre le chrono avant de prendre sa retraite.
* Article publié par Ailéen Kimutai
Voir en ligne : Le Matin.ch