Course à pied : État des lieux, risques et prévention
Publié le mardi 8 avril 2025 à 18h08min
Le semi-marathon de Madrid a récemment été endeuillé par le décès tragique d’un coureur de 35 ans, victime d’un infarctus à l’approche de la ligne d’arrivée. Cet incident rappelle les risques inhérents à la course à pied et souligne l’importance de mesures préventives pour assurer la sécurité des participants. Cet événement constitue le point de départ d’une réflexion plus large sur l’état actuel de la course à pied à l’échelle mondiale, les incidents survenus ces dernières années et les leviers de prévention.
La course à pied est aujourd’hui l’un des sports les plus populaires dans le monde. Accessible, peu coûteuse et adaptée à tous les niveaux, elle est plébiscitée pour ses bienfaits sur la santé physique et mentale. Toutefois, la popularité croissante des événements grand public comme les marathons et les trails s’accompagne de risques non négligeables et n’est pas sans risques. Chaque année, des incidents, parfois dramatiques, surviennent lors de ces compétitions. Cet article se propose d’examiner l’état des lieux de la pratique de la course à pied dans le monde, de recenser les types d’incidents survenus ces dernières années, et d’explorer les mesures préventives à mettre en place pour protéger les coureurs.
– L’état des lieux de la course à pied dans le monde
La course à pied rassemble des dizaines de millions de pratiquants à travers le globe. Selon Statista, environ 48 millions d’Américains ont pratiqué la course ou le jogging en 2023. En Angleterre, 6,3 millions de personnes participaient régulièrement à des activités de running ou d’athlétisme. En France, le phénomène est aussi en croissance, avec une augmentation de la participation aux courses urbaines et une diversification des formats.
D’après le rapport "The State of Running 2019" de RunRepeat, la participation mondiale aux courses a culminé en 2016 avec 9,1 millions de coureurs, avant de redescendre à 7,9 millions en 2018. Si l’Europe et les États-Unis ont vu une baisse, l’Asie, et notamment la Chine, connaît une forte progression. Le profil du coureur a également évolué : l’âge moyen est passé de 35,2 ans en 1986 à 39,3 ans en 2018, et la proportion de femmes a dépassé celle des hommes (50,24 % en 2018).
Le trail running a connu une croissance spectaculaire de 231 % au cours des dix dernières années. Selon "The State of Trail Running 2022", les femmes représentent désormais 46 % des participants, contre 13 % en 1997. La distance moyenne d’une course de trail est de 24,63 km, soit 140 % de plus que les courses sur route, et l’âge moyen des participants est de 39,5 ans. Les pays comme le Canada, la Nouvelle-Zélande ou l’Argentine comptent même davantage de femmes que d’hommes dans certaines épreuves.
En 2024, une étude du Great Run Company montre une augmentation de 39 % de la participation à la course à pied, principalement portée par la génération Z. Près de 53 % des coureurs seraient de nouveaux pratiquants.
– Typologie des incidents en course à pied
Malgré les bénéfices reconnus de la course à pied, la participation à des événements organisés n’est pas sans risques. Une étude publiée en 2023 dans Frontiers in Sports and Active Living révèle que les incidents médicaux graves en course sont rares (environ 1 cas pour 100 000 participants), mais leur impact reste dramatique. Voici les principales typologies :
- Accidents cardiovasculaires : Ils représentent la principale cause de décès subits lors de courses. Les marathons et semi-marathons sont les plus concernés, notamment chez les hommes de plus de 35 ans. Ces incidents sont souvent liés à des pathologies non détectées ou négligées (comme l’athérosclérose). Une publication récente (s41598-025-92141-2) insiste sur l’intérêt des IRM cardiaques avancées pour détecter ces risques silencieux. Ces événements, bien que rares, peuvent survenir sans signe avant-coureur et nécessitent une véritable vigilance collective et individuelle.
- Blessures musculo-squelettiques : Tendinites, entorses, fractures de fatigue ou douleurs articulaires constituent une part importante des arrêts de course et des abandons. Elles touchent autant les coureurs débutants (par surmenage ou mauvais équipement) que les expérimentés (par surentraînement). Une étude (s41598-024-54112-x) a montré que le trail pratiqué intensivement augmente les risques chroniques de TMS au niveau des genoux et des hanches après 3 à 5 ans. Les statistiques indiquent que jusqu’à 50 % des coureurs réguliers peuvent subir une blessure au cours d’une année donnée.
- Problèmes métaboliques : Le manque d’hydratation ou un excès d’eau peut provoquer hyponatrémie, crampes, épuisement, ou coup de chaleur. Une autre recherche (s41598-023-45055-w) alerte sur les risques rénaux élevés après des ultra-marathons. Ces troubles sont souvent dus à une méconnaissance des besoins du corps pendant l’effort prolongé.
- Incidents liés au terrain : Spécifiquement en trail, les chutes, glissades, chocs avec obstacles ou entorses sont courants. Une mauvaise signalisation ou un manque de préparation mentale et physique peut aggraver ces risques. Les statistiques disponibles montrent que jusqu’à 30 % des participants aux courses de trail subissent au moins un incident mineur par épreuve.
Par ailleurs, une étude (s41598-024-67525-5) explore comment l’anxiété de performance non prise en charge peut influencer négativement la santé cardiovasculaire, en particulier chez les trentenaires urbains. Enfin, la privation de sommeil, selon (s41598-022-13844-4), augmente de 65 % le risque de blessure, tous types de course confondus.
– Mesures de prévention à mettre en place
- Dépistage médical préalable : Une évaluation médicale annuelle, incluant un électrocardiogramme à l’effort pour les plus de 35 ans ou les personnes avec antécédents familiaux, permet de détecter des anomalies silencieuses. Les IRM cardiaques, comme le suggère l’étude s41598-025-92141-2, pourraient devenir un outil clé pour des populations à risque élevé.
- Planification de l’entraînement : La progression doit être adaptée, structurée, et accompagnée de phases de récupération. Trop de coureurs abandonnent en raison de blessures précoces, comme le montre l’étude s41598-019-41010-w (11 à 13 % d’abandons la première année). Les applications de coaching (Strava, Garmin Coach, Runkeeper) ou les clubs d’athlétisme jouent un rôle clé dans cet accompagnement.
- Hydratation et alimentation : Comprendre ses besoins spécifiques (sel, glucides, eau) est essentiel, surtout sur les formats longs. Une mauvaise stratégie d’hydratation peut avoir des effets aussi graves qu’une déshydratation. L’étude s41598-023-45055-w met en garde contre les atteintes rénales sévères en cas de gestion inadéquate de l’hydratation.
- Équipement et sécurité : Porter des chaussures adaptées à sa morphologie et à la nature du terrain, utiliser des équipements de sécurité (lampe frontale, couverture de survie, sifflet) en trail, et respecter la météo sont autant de gestes simples mais cruciaux.
- Écoute de soi : Apprendre à reconnaître les signaux d’alerte (douleur thoracique, essoufflement inhabituel, vertige) et ne pas hésiter à ralentir ou abandonner est un signe de maturité sportive. Une attention particulière à la santé mentale, comme le souligne s41598-024-67525-5, permet aussi de prévenir des réactions physiologiques dangereuses liées au stress.
- Organisation responsable : Les organisateurs doivent garantir un encadrement médical de qualité : défibrillateurs tous les 5 km, secouristes visibles, signalisation claire, postes de ravitaillement, protocoles d’urgence bien rodés. Certains événements, comme l’UTMB ou le Marathon de Paris, proposent même un questionnaire de santé préalable et refusent l’accès à ceux jugés à risque élevé.
Une approche préventive bien structurée permet de diminuer fortement les risques tout en continuant à promouvoir la course à pied comme un sport de santé.
– Conclusion
La course à pied est un formidable vecteur de santé, de lien social et d’épanouissement personnel. Sa popularité mondiale ne cesse de croître, en particulier chez les jeunes et les femmes. Toutefois, les dérives de l’hyperperformance, la sous-estimation des risques et le manque de préparation peuvent transformer un moment de plaisir en drame. L’incident du semi-marathon de Madrid, bien que rare, rappelle que courir n’est pas un acte anodin. Promouvoir une pratique encadrée, individualisée et responsable est la condition nécessaire pour continuer à faire de la course à pied un sport sûr et accessible à tous. C’est en combinant prudence individuelle et organisation collective que la course à pied conservera toute sa puissance de transformation positive.
Voir en ligne : Marathons
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